train your mind to something good /allie.

samedi matin. gaël est chez ses parents. ils ont insistés pour l'avoir, pour profiter de lui mais également, constatant l'état de nerfs d'agnès, pour que cela lui dégage du temps. comme chaque fois, cela lui a fait un crève-coeur. se séparer de son fils, un weekend, son temps libre, c'est difficile mais elle a besoin, effectivement, de profiter de sa trentaine et de se détendre. pour l'occasion, agnès a prévu de voir allie, son amie depuis vingt ans, sa compère. elle considère allie comme une soeur, même, parce qu'au fond, avec la sienne, elles ne se sont jamais comprises. allie lui a donné rendez-vous dans un club de yoga. un mystère absolu pour agnès, peu sportive. son seul sport, c'est de courir partout, tout le temps. être une maman célibataire devrait être un sport olympique et on ne parle pas assez de l'énergie que cela demande, d'être à la fois le papa et la maman d'un gosse de trois ans, éveillé. heureusement, il y a archie, qui le garde souvent, ainsi que ses parents, fiers comme tout. dans les vestiaires, agnès enfile un pantalon de yoga qui est en réalité un ancien pantalon de grossesse ainsi qu'une petite brassière. elle regarde autour d'elle, les autres participantes et elle se sent énorme et moche. déprimée, en plus de tout cela, avec ce constat. finalement, elle enfile un tee-shirt par dessus, où gaël a marqué l'empreinte de ses mains à la peinture, ridicule mais mignon à ses yeux de maman. elle noue ses cheveux, vulgairement, puis va dans la salle. elle s'inquiète, allie n'est pas encore là. agnès prend place sur un tapis, au fond, dans un coin discret. elle attend sagement, en tailleur et ne peut pas empêcher un soupir de soulagement lorsqu'elle voit allie débarquer.

nous étions samedi matin. certaines personnes profitent de leur week-end pour se reposer, faire la grasse mat' et tout le tralala. pour moi, que nenni. il était hors de question de se relâcher. ce n'était pas bon pour le corps ni pour les muscles. à mes yeux, il était important de rester en action pour garder un corps svelte. de plus, cela me faisait toujours du bien. le yoga m'avait apportée la concentration et la patience qui m'avaient quelques fois fait défaut. en effet, il y a quelques temps, je me mettais la pression car je n'arrivais à terminer une toile que j'avais commencé plusieurs moi auparavant. j'étais toujours exigeante avec moi-même. trop d'ailleurs mais soit. le yoga avait été mon refuge et je ne pouvais plus m'en passer maintenant. le réveil avait sonné à l'heure prévue. toutefois, j'avais un peu flemmardé dans mon lit. tiens donc, que m'arrivait-il ? je me ramollissais. je me donnais un coup de pied au cul imaginaire et j'étais aussitôt debout devant mon lit. deux pas en avant et j'étais la tête fourrée dans ma penderie. où était ce foutu jogging gris à bandes roses ? grrrr, je m'agaçais. j'étais un brin psychorigide parfois. je voulais mettre celui-là et seulement celui-là. après au moins dix minutes, je trouvais enfin ce que je voulais. j'enfilais alors ma tenue, mes baskets blanches et je pris le temps de savourer un café dans ma cuisine. temps que j'aurais plutôt dû passer à courir pour attraper un taxi... bref ! mon café dégusté, je parvins à héler un taxi en bas de mon immeuble et j'arrivais alors à amagansett pour le cours. je poussais un long soupir en arrivant en courant. grâce au ciel, le cours n'avait pas débuté. j'aperçus alors ma meilleure amie, agnès au fond de la salle. j'eus un rire intérieur : elle avait voulu se planquer, cela ne faisait aucun doute. je me dirigeais vers elle. elle m'avait apparemment gardée un tapis. heureusement que tu étais là, nous n'aurions pas eu de place autrement. je déposais un baiser sur sa joue avant de m'asseoir au sol. pour info, ça servait à rien de te planquer au fond parce que la prof fait le tour de la salle, pour checker ce qu'on fait. j'eus un léger rire. j'aperçus des regards agacés se tourner vers nous, genre bouvlez-la bande de nazes. je poussais un soupir plus qu'audible avant de reporter mon attention sur agnès.

allie arrive finalement, quand agnès ne l'attend plus et commence à se dire qu'elle va vite remballer son tapis et partir discrètement en courant pour retourner dans son lit parce que putain, elle manque cruellement de sommeil. allie lui annonce que sans elle, elles n'auraient pas eu de place. insensible, la mère célibataire hausse des épaules. oh bah tu sais, j'm'en serai remise si on n'avait pas eu de places. allie l'embrasse et s'assoit à ses côtés. agnès tourne son regard vers elle en attendant, pas très impatiente, que le cours commence. elle ne peut pas s'empêcher de soupirer en découvrant qu'apparemment, la professeur de yoga fait le tour de la salle pour surveiller ses élèves. d'ailleurs, la prof ne tarde pas à donner le signal de départ du cours. il commence en douceur, rien de très difficile pour le commun des mortels mais pour une femme épuisée et qui n'a jamais été sportive comme agnès, cela a déjà un bon niveau, trop haut. on indique de mettre la main au pied, un bras tendu en l'air. agnès souffle, probablement rouge écarlate. putain de merde, la rééducation de mon périnée, c'était y'a trois ans, allie, j'étais censé me détendre !, ronchonne agnès. elle s'imaginait siroter du thé en faisant des bruits étranges, pas suer comme un boeuf comme la nuit de son accouchement. agnès souffle, essayant de respirer normalement mais elle a l'impression de suffoquer. certains se retournent, la regardent d'un mauvais oeil parce qu'elles, se sont des miss parfaites. agnès leur adresse un mauvais regard. oh mais tapez-vous un accouchement d'un gamin de 4 kilos et vous verrez qu'après, c'est compliqué la position de l'avion qui se crashe !

alors que je suis en train de m'asseoir, j'entends ma meilleure amie râler et ça me fait légèrement rigoler. agnès est décidément incorrigible. ne commences pas à râler, agnès... t'es venue parce que t'as bien voulu, mademoiselle. t'es venue de ton côté, t'aurais eu le temps de t'échapper. je me voulais un brin moralisatrice mais c'était davantage pour rire qu'autre chose. agnès me rappelait souvent son fils. ou alors, c'était plutôt l'inverse. alors que nous sommes en train de discuter de tout et de rien, je vois que padmé commence à faire le tour de la salle, comme je l'avais prédit. comme d'habitude, elle nous dit d'inspirer et d'expirer profondément. en effet, nos muscles ont besoin d'être oxygénés correctement pour que ça aille bien. je prends la position qu'indique la coach. après tout, j'en ai l'habitude à présent. je jette un œil vers agnès qui semble galérer. à ses paroles, je pouffe de rire. arrête agnès, on va se faire remarquer. t'es censée te concentrer et ne pas trop parler pour que ça te relaxe. je lui souris gentiment puis je reprends finalement place. je me reconcentre sur le cours, face aux légers gémissements de douleur d'agnès, certaines femmes se retournent vers nous, d'un air profondément agacé. leurs tronches me signifient : bordel ! t'étais obligée de la ramener ta copine ! agnès s'empresse de répondre à leurs regards par la parole. calme-toi agnès. ça va aller. c'est ton premier cours, c'est normal que ce soit compliqué... et vous, regardez devant si on y est. je regarde agnès d'un air finalement compatissant. elles vont pas nous faire chier, bordel. je pense alors que si ça continue, on s'barre. toutefois, je ne confie pas ma pensée à agnès de peur qu'elle fasse exprès d'être bruyante pour mettre fin à son labeur.

la réflexion d’agnès fait rire son amie qui la réprimande toutefois en lui indiquant qu'il faut rester concentrée. agnès tente de le rester mais déjà, elle sent des courbatures naître partout dans son corps et c'est une chose désagréable pour elle. visiblement, le seul sport qui lui convient est de courir après gaël quand il décide de n'en faire qu'à sa tête, courir pour le déposer/reprendre à l'école et aller/rentrer du travail perchée sur des escarpins qui lui massacrent les pieds. allie envoie balader plus poliment les jeunes femmes qui sont dérangées par agnès et ses gémissements de douleur. elle prend sur elle, elle essaie, vraiment, pour faire plaisir à son amie de toujours, sa quasi-soeur. la professeur vient l'aider. elle lui indique une position plus simple qui effectivement demande moins d'efforts et invite agnès à faire un exercice de respiration. assise en tailleur, elle a nettement moins mal et parvient enfin à se détendre. tellement qu'elle sent qu'elle s'endort, elle qui manque cruellement de sommeil. elle n'a pas bien dormi depuis sa séparation avec jaimie, il y a quatre ans, alors qu'elle était enceinte d'archie de quatre mois. la paternité d'archie est d'ailleurs un mystère pour allie. comme pour tout le monde, agnès a menti et raconté à son ami que le géniteur de gaël est bien jaimie, qui s'est barré. jaimie, son collègue de travail qui lui fait vivre un enfer au travail. je suis en train de m'endormir, souffle agnès en baillant.